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04.04.2024 : Le blues vous aimez? Eric Grivel président du BAG

4 avril 2024 par
04.04.2024 : Le blues vous aimez? Eric Grivel président du BAG
VPI
> Salut Eric, tu es président du BAG, Blues Association Geneva, depuis 5 ans, tu as complètement relancé cette association qui depuis 5 ans a triplé de taille. Comment expliques-tu cet engouement pour le blues à Genève? Qu’est-ce qui est bien au BAG ?


Ta question touche un point crucial. Le BAG, fondé en 2008 par Jean-François Mathieu, a connu un véritable tournant lorsqu'il s'est installé à son emplacement actuel, la Brasserie des Grottes. Personnellement, j'ai rejoint l'association vers 2012-2013, époque à laquelle je participais timidement aux jams en jouant du piano. Malgré mon expérience, monter sur scène était à l’époque un défi pour moi. Le BAG a frôlé la fermeture en 2019, mais encouragé par des amis musiciens, j'ai accepté de prendre les rênes. Depuis, avec engagement et dévotion, nous avons effectivement vu l'association fleurir.

 

Ce qui distingue le BAG, c'est son atmosphère unique. Dans mes messages semestriels à nos membres – qui s’appellent Le mot du Pres’ – j'insiste sur cette ambiance familiale qui caractérise nos rassemblements, appréciée tant par les musiciens que par les amateurs de musique. C'est cette convivialité et cette passion partagée qui font de notre espace un lieu où chacun désire revenir.



Comment devient-on membre du BAG ?


Devenir membre du BAG est très simple, et c’est aussi avantageux – je vais nous faire un peu de pub puisque tu le permets (rires). L'adhésion annuelle s'élève à 90 francs, offrant un accès gratuit à toutes les jam sessions, organisées entre 10 et 12 fois par an, incluant des pré-concerts. Ces moments sont des occasions privilégiées pour les musiciens et spectateurs de se retrouver dans une ambiance conviviale. En plus des jams, l'adhésion donne accès à nos concerts, dont le nombre a atteint 15 ou 16 l'année dernière. 

 

Pour les non-membres, l'entrée est fixée à 15 francs, tandis que les tarifs sont réduits à 10 francs pour les bénéficiaires de l'AI ou de l'AVS, et à seulement 5 francs pour les membres. Au-delà de ces avantages économiques, devenir membre du BAG signifie soutenir une association dont la gestion repose entièrement sur le bénévolat de son comité. Ainsi, les membres contribuent directement au succès de l'association tout en profitant de ses activités à un coût réduit.



Quelles sont les dernières nouvelles du BAG ?


Au BAG, jusqu'à ce jour, il semblait n'y avoir aucune nouveauté notable, mais en réalité, plusieurs développements significatifs ont eu lieu. Premièrement, l'association a connu une augmentation notable du nombre de membres, atteignant presque 180. Cette croissance est d'autant plus remarquable que le BAG attire désormais des groupes musicaux de toute l'Europe, voire au-delà, avec une moyenne de cinq demandes de participation par jour. Malgré cette popularité, la politique du BAG reste de refuser la majorité de ces demandes pour préserver des opportunités pour les groupes locaux.

 

Par ailleurs, une nouveauté majeure pour le paysage musical genevois est l'introduction du Geneva Blues Evening, un événement nouveau et inédit prévu à l'Alhambra avec la participation de deux groupes. Cette initiative marque une étape importante dans la diversification des activités proposées par le BAG.

 

En outre, le BAG a lancé les soirées "Beyond the Blues" les vendredis, en réponse à la demande croissante pour des musiques se situant à la frontière du blues et du rock. La première de ces soirées a rencontré un succès considérable, featuring Zoso, le Tribute Band de Led Zepplin. D'autres dates sont déjà programmées, dont un événement le 12 avril avec les Lawdy Mamas, illustrant l'engagement du BAG à promouvoir une variété de musiques influencées par le blues, sans se limiter strictement à ce genre.



Le BAG prévoit d'organiser son tout premier Geneva Blues Evening le 19 avril, dans un cadre prestigieux. Comment est venue cette idée ? Qu’espérez-vous réaliser avec ce premier événement? Est-ce qu’il y aura d’autres événements à venir ?


Pour le Geneva Blues Evening, prévu pour le 19 avril dans une salle prestigieuse, l'idée a émergé lors de discussions avec le département de la Culture de la ville de Genève. En quête de soutien financier supplémentaire, le BAG a saisi l'opportunité d'occuper la salle de l'Alhambra à un tarif préférentiel. 

 

L'objectif principal de cet événement est de promouvoir le BAG au-delà de ses locaux habituels, une stratégie de visibilité étendue. Cette initiative, fruit de délibérations internes et de collaborations avec des partenaires, pourrait préfigurer l'organisation d'un festival blues genevois dans l’avenir.




Pour le Geneva Blues Evening prévu le 19 avril, peux-tu détailler qui se produira en première partie et nous en dire plus sur Band of Friends ?


Pour le Geneva Blues Evening du 19 avril, la programmation a été soigneusement élaborée après une réflexion approfondie. Initialement, nous envisagions d'organiser l'événement sur deux jours, mais sur conseil du responsable de la gestion de l'Alhambra, nous avons décidé de concentrer l'événement sur une seule journée et de limiter le nombre de groupes à deux, pour assurer un lancement réussi.

 

La sélection des groupes a dû tenir compte de contraintes budgétaires, avec des cachets potentiellement élevés. Nous avons choisi de mettre en avant le talent local en constituant un ensemble exceptionnel de 13 musiciens membres du BAG, sous la direction artistique d'Yves Staubitz. Ce groupe, nommé Geneva Blues Band pour l'occasion, interprétera des classiques du blues en première partie de soirée. Cette formation est une célébration du talent et de la passion pour le blues au sein de notre communauté, bien que son avenir en tant que tel reste à définir.

 

En seconde partie, nous aurons le privilège d'accueillir Band of Friends, composé d'anciens musiciens de Rory Gallagher, notamment Jerry McAvoy, son bassiste de longue date, et Brendan O'Neill, son batteur. Ces musiciens expérimentés, actifs principalement en Europe, rendent hommage à l'héritage musical de Rory Gallagher. Le groupe est mené par le talentueux Marcel, un guitariste et chanteur d'origine néerlandaise, dont le nom est difficile à prononcer mais dont le talent est indéniable. Cette soirée promet d'être un événement mémorable pour tous les amateurs de blues.



On va changer de sujet. Qu'est-ce qui te plaît dans le blues ? Comment t'es-tu mis à jouer ou à écouter du blues ?


Mon initiation au blues ne s'est pas faite avec le Chicago Blues ou le Texas Blues, mais avec le British Blues, qui, pour beaucoup de musiciens assez orthodoxes, n'est pas considéré comme du "vrai" blues. J'ai grandi en écoutant Rory Gallagher, par exemple, et je suis tombé amoureux de cette musique qui, finalement, penche beaucoup vers le rock.

 

Des artistes tels qu'Eric Clapton, Jimmy Page, Jeff Beck, et Alvin Lee ont également joué un rôle significatif dans mon éducation musicale. John Mayall mérite aussi une mention spéciale. Il incarne le point de départ du blues pour ma génération, se positionnant comme une figure centrale du blues blanc. L'influence d'Alexis Korner et John Mayall a été déterminante dans ma découverte du blues. De plus, la simplicité apparente du genre, souvent réduit à trois accords, m'a initialement attiré, bien que je reconnaisse rapidement la complexité et la maîtrise requises pour les exécuter avec justesse. C'est ainsi que ma passion pour le blues s'est développée, une passion qui englobe également un amour profond pour le rock.



Quel est ton style de blues préféré ? As-tu des artistes fétiches ? Tu évoquais le British Blues ; peux-tu nous parler des figures emblématiques de ce genre pour toi ?


Rory Gallagher a marqué ma découverte du blues à l'adolescence, autour de 13-14 ans, immédiatement après ma rencontre avec Ten Years After, véritables ambassadeurs du British Blues de l’époque, pour moi. Cette période a été le point de départ de mon exploration musicale, qui s'est ensuite élargie à une multitude d'artistes.



Tu as donc exploré les origines de cette musique ?


Effectivement, je me suis intéressé aux racines du blues, à des artistes fondamentaux comme Robert Johnson. Cependant, et cela peut surprendre, ma dévotion va avant tout au British Blues, même si le Chicago Blues occupe également une place importante dans mes préférences. Stevie Ray Vaughan, figure du Texas Blues, est pour moi également un artiste de premier plan, emblématique de ce style, bien qu'il nous ait quittés prématurément. Il figure clairement parmi mes références essentielles



Tu es donc guitariste et chanteur dans le groupe de blues Easy Groove ; quelle signification cela a-t-il pour toi ?


Pour moi, être membre d'Easy Groove repose sur deux piliers fondamentaux : le partage et la communauté. La musique est, à mes yeux, une expérience de partage profondément humaine. D'une part, il y a la complicité avec les membres du groupe, et d'autre part, l'échange avec le public lors des concerts. Avoir l'opportunité de jouer sur de grandes scènes plusieurs fois par an, de voir des gens danser, sourire et exprimer leur joie, représente l'essence même de ce partage et de cette joie pour moi.

 

Dans le cadre du groupe, notre travail consiste principalement à interpréter des reprises, même si nous avons aussi quelques compositions personnelles. Malgré les défis et la rigueur que cela implique, ces moments restent empreints d'un sentiment de partage véritable. Les répétitions, qu'elles soient hebdomadaires ou bihebdomadaires, sont des rendez-vous attendus, des moments où l'on se fixe des objectifs, comme de jouer à tel ou tel endroit. Cette dynamique est extrêmement gratifiante.



Joues-tu d'autres instruments à part la guitare ?


Oui, la guitare est le dernier instrument que j'ai appris. Mon initiation musicale a commencé avec le piano, présent chez mes parents depuis ma plus tendre enfance. Poussé par leurs encouragements, j'ai entrepris des cours de piano vers l'âge de six ans, mais l'aspect théorique et le solfège m'ont rapidement découragé, et j’ai arrêté après seulement six mois. Malgré l'arrêt des cours, comme j’avais l’esprit autodidacte, je me suis remis au piano, ce qui m’a permis de participer en tant que pianiste dans un groupe nommé Keep on Rocking durant vingt ans, période durant laquelle nous avons connu un certain succès dans la région franco-genevoise et franco-vaudoise.


Par la suite, j'ai également exploré la batterie, pour laquelle j'ai suivi des cours, ce qui m’a donné une solide base rythmique. Ce n'est qu'après ces expériences que je me suis tourné vers la guitare, instrument avec lequel je me produis aujourd'hui dans le groupe Easy Groove, tout en essayant de m'adonner au chant.

 

Malgré cette diversité instrumentale, je ressens une certaine mélancolie à ne pas avoir atteint une maîtrise exceptionnelle dans un domaine spécifique, me considérant comme un musicien moyen dans l'ensemble. Et on peut dire que cette polyvalence et cette passion pour la musique sont des atouts qui enrichissent ma contribution au sein du BAG.



À part le blues, quels genres musicaux affectionnes-tu particulièrement ?


Mes goûts musicaux sont divers et variés. Je me décrirais comme quelqu'un d'éclectique, capable d'apprécier différentes formes d'art musical. Par exemple, il m'arrive de savourer de la musique classique le dimanche matin, non de manière rituelle, mais pour la beauté et la complexité des œuvres, notamment celles de Chopin. Je ne me consacre pas exclusivement à ce genre, mais j'ai un faible pour la musique classique.

 

Concernant le jazz, je dois avouer que ce n'est pas mon domaine de prédilection. Mon intérêt se porte sur des formes de jazz plus accessibles, celles qui flirtent avec le blues ou des sonorités similaires. Le rock occupe également une place de choix dans mon univers musical, tandis que le rap ne suscite pas mon intérêt. La pop, en revanche, fait partie de mes écoutes régulières.

 

Quant au jazz-rock, je l'apprécie tant qu'il reste fidèle aux harmonies qui me sont chères. Je suis moins attiré par les compositions aux structures trop complexes ou atypiques.



Concernant Servette-Music, quelle est ton opinion ?


Ma relation avec Servette-Music est profondément ancrée dans l'histoire personnelle et émotionnelle. Ayant grandi dans le quartier, le magasin a toujours été un point de repère pour moi, attirant mon attention dès l'enfance. C'est là que j'ai franchi pour la première fois le seuil d'un magasin de musique, ce qui confère à Servette-Music une place spéciale dans mon cœur. Avec le temps, j'y ai même acheté du matériel, malgré des moyens limités durant ma jeunesse.

Ma prise de présidence au BAG a été l'occasion de renouer avec ce partenaire historique de l'association, ce qui m'a permis de rencontrer Claude. Son engagement et son expertise auprès du BAG ont renforcé ce lien émotionnel.

 

Au-delà de l'aspect affectif, Servette-Music se distingue par la qualité et la diversité de son offre instrumentale. Le magasin propose un choix remarquable en matière de guitares, avec des conseils avisés qui mettent à l'aise et encouragent à tester les instruments sans pression. Cet accueil chaleureux et cette approche humaine rendent l'expérience particulièrement agréable. Le rayon des percussions, ainsi que l'espace consacré aux pianos, ont également évolué, offrant de nouvelles possibilités aux musiciens. La section dédiée aux instruments à vent, véritable pilier historique de Servette-Music, continue d'attirer une clientèle fidèle et variée, même si je ne pratique pas ces instruments. Cette dimension historique et cette richesse de l'offre font de Servette-Music un lieu incontournable pour les musiciens.


Quels conseils donnerais-tu à quelqu'un, jeune ou moins jeune, désireux de se lancer dans le blues ?


Offrir des conseils directs peut s'avérer délicat. Je préférerais plutôt accompagner la personne intéressée par le blues, qu'il s'agisse d'un jeune ou d'un adulte aspirant à découvrir ce genre musical. Nous constatons régulièrement, au BAG, des individus de quarante ans exprimant le désir de débuter dans le blues après avoir assisté à nos événements. Le BAG sert de tremplin formidable pour connecter les gens avec cette musique, rassemblant des enseignants, des musiciens amateurs et professionnels prêts à partager leur passion et leur savoir.

 

L'idée est d'encourager les échanges, d'écouter ensemble, et puis de discuter des impressions et des aspirations musicales. Par exemple, récemment, un membre m'a confié son désir de prendre des cours pour s'améliorer, malgré ses plus de quarante ans, tout en souhaitant éviter le solfège. Dans ces cas-là, le BAG devient un lieu privilégié pour orienter, conseiller et soutenir dans la recherche d'une formation adaptée, sans forcément passer par l'apprentissage académique du solfège.

 

Au fond, ma recommandation s'articulerait donc plutôt autour de l'accompagnement et de la mise en réseau au sein du BAG, où chaque personne peut trouver les ressources et le soutien nécessaires pour explorer et s'épanouir dans le blues.